jeudi 14 août 2014

Recep Tayyip Erdogan : 10 perles pour le meilleur et pour le pire

 
 
Leader incontesté de la Turquie depuis 11 ans, le nouveau président Erdogan passe généralement peu de temps sans faire parler de lui, souvent à grands renforts de déclarations tapageuses ou contradictoires. En voici dix pour (re)présenter celui qui, paraît-il, rêve d’un nouvel Empire ottoman. Le nouveau président de la République turque, Recep Tayyip Erdogan, le 10 août 2014 à Ankara Au fil de ses déclarations, le nouveau président turc sème le flou sur ses véritables intentions au sujet de la Turquie...
 

Elu au premier tour de la première élection présidentielle au suffrage universel direct avec 52% des voix, Recep Tayyip Erdogan est un dirigeant controversé. Homme fort de la Turquie depuis 2003, date de son accession au poste de Premier ministre suite au triomphe de son parti, l’AKP (Pour le justice et le développement), il s’est construit une figure de dirigeant à l’aura internationale. Mais aussi de spécialiste de la controverse et de la contorsion.

Erdogan et les valeurs démocratiques : “Nous allons éradiquer Twitter“

Arrivé au pouvoir par les urnes et réélu sans contestation possible à deux reprises, Erdogan ne revêt pourtant pas avec aisance le costume du grand démocrate. Sa gestion de la crise de Taksim, en 2013, où la police avait lourdement réprimé le mouvement de contestation du pouvoir, ne correspondait pas vraiment à ce qu’on attendait de quelqu’un qui, en 2003, expliquait à propos des contestations kurdes :

“Nous allons régler chaque problème avec encore plus de démocratie, plus de droits civils, et plus de prospérité, dans le respect de l’ordre constitutionnel, du principe républicain et des principes fondamentaux que nous ont légués les pères fondateurs de notre pays.“

Le mouvement de répression étonna moins de la part d’un dirigeant capable d’intimer à une journaliste (“une militante effrontée“) de “rester à (sa) place“ ou d’avancer sans ciller :

“Nous allons éradiquer Twitter. Je me moque de ce que la communauté internationale dit. Le monde va être témoin du pouvoir de la République turque.“

Erdogan et le génocide arménien : “S’il y a eu génocide, pourquoi en reste-t-il ?“

La reconnaissance du génocide arménien fait figure de serpent de mer dans l’histoire politique turque. Malgré les appels du pied de la communauté internationale, difficile d’arracher de la part des dirigeants turcs un acte de contrition au sujet du massacre de 1,2 million d’Arméniens ordonné par l’Empire ottoman entre 1915 et 1916.

Erdogan n’a pas échappé à la règle, s’interrogeant de la manière suivante lors d’un meeting de campagne, en avril dernier :

“Ce n’est pas possible car s’il s’agissait d’un génocide, pourrait-il encore y avoir des Arméniens dans ce pays [la Turquie] ?“

Une prise de position qui avait étonné, alors que le candidat avait tendu une main timide à la communauté arménienne quelques jours plus tôt :

“Nous souhaitons que les Arméniens qui ont perdu la vie dans les circonstances qui ont marqué le début du XXe siècle reposent en paix et nous exprimons nos condoléances à leurs petits-enfants.“

Sans être vraiment contradictoires, les interventions de l’homme fort de la Turquie sur l’Etat hébreu varient beaucoup.

Soutien inconditionnel de la bande de Gaza, il se montre pourtant clair sur les questions de l’existence d’Israël ou sur son rejet de l’antisémitisme.

“Chacun devrait accepter sans condition qu’Israël est un élément indispensable à la mosaïque du Moyen-Orient.“

Ce qui ne l’empêche pas de s’en prendre violemment à Shimon Peres, alors président d’Israël, lors d’un forum international, en 2009, à Davos.

“Je pense que vous devez vous sentir un peu coupable. (...) Vous avez tué des gens. Je me souviens des enfants qui sont morts sur des plages.“

Ou alors, de s’aventurer à une comparaison “godwinesque“ entre les agissements d’Israël en Palestine et l’Holocauste, le 31 juillet 2014 :

“Dites-moi, quelle est la différence entre les opérations israéliennes et celles des nazis et d’Hitler ?“

Sans oublier cette saillie pour le moins anti-israélienne pour ne pas dire antisémite, en mai 2014, en visite sur les lieux de la catastrophe minière de Soma :

“Où vas-tu, espèce de sperme d’Israël, viens par ici !“

Erdogan et la laïcité : “Les mosquées sont nos casernes“

“Les minarets sont nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées nos casernes et les croyants nos soldats.“

En reprenant cette citation du poète nationaliste Ziya Gölalp en 1998, Erdogan, alors maire d’Istanbul, ne fait pas mystère de ses croyances. Un engagement qui lui vaut d’ailleurs de passer 4 mois en prison.

Mais dans un pays comme la Turquie, avec l’héritage du grand dirigeant laïc Mustapha Kemal “Atatürk“, mieux vaut ménager ceux qui tiennent encore à la séparation entre l’Etat et la religion. Même si l’interprétation de la laïcité de celui qui voulait former “une jeunesse religieuse“ le tient à raisonnable distance de celle qui a cours en France ou au Canada :

“Un Etat laïque est un Etat qui se tient à égale distance de toutes les croyances quelles soient musulmanes, chrétiennes, juives ou athées.“
Source Armenie News