dimanche 18 janvier 2015

Les relations Israël / Inde : Missiles, irrigation, énergie et cybertech, les relations autrefois clandestines sont aujourd'hui florissantes...

 
"Beaucoup d'Histoire et beaucoup de Géographie» voilà comment expliquait il y a quelques années, l’ancien ambassadeur d’Israël en Inde à l'auteur de ces lignes la fascination de l’Inde pour les nombreux Israéliens qui envahissent ce pays. Cet héritage historique et géographique est évidemment associé à des facteurs plus communs, comme les grands marchés, les produits et services moins chers, ainsi qu’un milieu plus serein...

En retour, beaucoup d’Indiens se sont également penchés sur Israël, essentiellement pour son esprit d’entreprise et d’innovation. Ainsi en six mois, Israël et le gouvernement de Narendra Modi, chef du parti Bharatiya Janata (BJP) ont nourri des relations qui ont progressé de manière exponentielle.
C’était prévisible : le BJP a toujours été bienveillant à l’égard d’Israël. Par ailleurs, pendant les années d’isolement de Modi face à l’Occident en tant que ministre de Gujarat, les pays non-occidentaux comme le Japon, la Chine et Israël étaient ceux qui ont honoré son Etat en y faisant des investissements. Modi s’était même rendu en Israël à cette époque.
Cette faveur aurait été rendue sans aucun doute, mais la vitesse à laquelle elle s’est produite est quelque peu inattendue.
Modi avait rencontré en septembre Benyamin Netanyahou à New-York, une première entre les chefs des deux gouvernements de ces pays en plus d'une décennie.
Simultanément, Sushama Swaraj, ministre indien des Affaires étrangères avait également rencontré son homologue israélien Avigdor Lieberman. Swaraj avait déjà mené le groupe d'amitié parlementaire indo-israélien et avait visité Israël à cette occasion.
Peu de temps après, le cabinet de sécurité avait donné le feu vert après une longue impasse sur des accusations de corruption concernant l'achat de 262 missiles Barak-I israéliens pour la marine indienne.
A la suite de cela, un autre contrait portait sur l’acquisition de 8356 de missiles antichars israélien Spike, ainsi que de 321 missiles antichars américains de type Javelin. Il s’agissait d’une transaction importante, d’autant plus que les Etats-Unis avaient fait pression, proposant même un partenariat pour sa fabrication..
Les deux contrats se montaient au total à près de 560 millions d’euros.
“Pour l’Inde, les armes israéliennes sont trèst attrayantes à cause de leur technologie et leur fiabilité, ils livrent ce qu’ils ont promis », m’ a confié une source militaire. La plupart de cette technologie sert à la gestion des frontières ainsi qu’au système de surveillance, qui sont une exigence primordiale pour l’Inde.
Peu après les deux pays ont testé la seconde génération des missiles Barak, fabriqués conjointement.
Toutefois, le plus important se situe au niveau des relations bilatérales visibles, grâce aux rencontres et visites officielles du nouveau gouvernement – qui diffère totalement du précédent gouvernement qui, par opportunisme politique, a préféré entretenir une relation discrète.
Conformément à l'accord bilatéral Homeland Security signé sous le gouvernement précédent, le directeur du Conseil de sécurité nationale israélien s’est rendu en Inde en octobre dernier.
Puis en novembre, le ministre indien de l’Intérieur Rajnath Singhest venu à son tour en Israël.
Avec Netanyahou, il a discuté entre autre de la politique du gouvernement de Modi en faveur du “Made in India”, ayant pour but de susciter les investissements et de stimuler la production dans le pays, y compris en matière de défense, une politique encouragée par Netanyahou.
Depuis lors, il est question d’une visite de Sushma Swaraj en Israël ce mois-ci. Elle pourrait ouvrir la voie à une éventuelle visite du Premier ministre par la suite.
En parallèle, l'ex-président israélien Shimon Peres s’est rendu en Inde pour renforcer la coopération agricole.
Si la défense et la sécurité sont les sphères évidentes qui viennent à l'esprit dans le contexte des relations bilatérales, l'agriculture est un domaine où l’innovation et le savoir-faire israélien atteignent aussi bien paisiblement que directement la vie de millions d’Indiens.
Après sa visite en Israël, où il avait étudié les techniques de l’irrigation au goutte à goutte, Modi a promu la micro-irrigation dans le Gujarat, transformant ainsi l’image de l'agriculture dans lcet Etat.
Près de 70% de la population de l'Inde travaille directement ou indirectement dans l’agriculture, et beaucoup d’Etats s’engagent dans la coopération avec Israël dans le cadre du projet de coopération agricole indo-israélien, débuté en 2008.
Il s’agit du plus grand projet israélien de développement au monde. Il vise à mettre en place 29 centres d'Excellence pour l'agriculture dans 9 Etats. Cinq d’entre eux sont déjà pleinement actifs, et d’autres centres ont été inaugurés dans trois autres Etats au cours des deux derniers mois.
Il est donc peu étonnant que celui qui a pris récemment la fonction d’Ambassadeur d’Israël en Inde n’est autre que Daniel Carmon, l’ex président de Mashav, l’Agence de Coopération au développement international du ministère israélien des Affaires étrangères.
Israël est également un acteur majeur du sommet «Vibrant Gujarat» de 2015, qui a débuté le 7 janvier, avec le ministre de l’Agriculture Yaïr Shamir, en tête de la délégation israélienne.
La coopération indo-israélienne prend d’autres directions également.
Une méga usine de dessalement, fruit de la technologie israélienne est prévu dans la ville de Vishakhaatnam, au sud de l’Inde, à la suite d’une usine du même type déjà installée à Gujarat.
Les deux pays prévoient notamment de signer leur tout premier accord de coopération dans le domaine de l’énergie renouvelable, puisque l’Inde, qui importe actuellement 80% de ses besoins en énergie se concentre de plus en plus sur les énergies renouvelables.
Simultanément, Israël recherche des investissements indiens pour ses nouvelles réserves de gaz.
Le commerce bilatéral est florissant, estimé à 5 milliards de dollars, à l’exception de la défense.
Les entreprises israéliennes investissent en Inde, renforçant leur présence, et vice versa. Un accord de libre-échange est en cours de discussion depuis un certain temps déjà et pourrait être bientôt ratifié.
La coopération dans les domaines de la cyber-sécurité, de la culture et de l'éducation se poursuit.
Comme s’il reflétait la chaleur croissante du partenariat stratégique indo-israélien, le centre Chabad-Lubavitch à Bombay a célébré récemment Hannoukah pour la première fois depuis 2008, après avoir été été fermé suite à l'attaque terroriste barbare contre son siège. Et quand Modi a tweeté un « Joyeux Hannoukah » adressé à Netanyahou en hébreu, ce dernier lui a répondu en hindi.
Et au moment de la rédaction de l’article, des groupes d’étudiants sur les réseaux sociaux se réjouissent de l’élection d’un étudiant indien musulman au comité des étudiants de l’Université hébraïque de Jérusalem.
Cela ne fait que souligner le fait que contrairement aux idées reçues, les relations indo-israéliennes transcendent tous les clivages religieux.

Par Aditi Bhaduri
Source I24News