Les agriculteurs du désert israélien se reconvertissent dans l'aquaculture, en utilisant l'eau saumâtre des nappes phréatiques. L'exploitation agricole de la famille Harel produit en moyenne 400 000 poissons d’ornement chaque année, la totalité est exportée vers l'Europe. La ferme des Harel porte bien son nom, puisqu’elle s’appelle "Neguev Angels" ("les Anges du Neguev"). Elle se trouve à l’endroit le plus chaud et le plus aride d'Israël, dans la vallée de l’Arava. Ici, les fruits et légumes poussent dans le sable et ne s'abreuvent au goutte-à-goutte que d'eau saumâtre...
Cette exploitation familiale de cinq hectares produit des tomates cerises, des poivrons, des aubergines, des dattes et surtout, des poissons d’ornement.
"En 2000, nous avons décidé de développer un nouveau secteur.
Le Conseil Régional, nous a convaincus d'opter pour la pisciculture d’ornement" explique Monique Harel, qui dirige l'exploitation.
Dans la région de l'Arava, où tombe à peine 30 mm de pluie par an, trois exploitations agricoles élèvent des poissons.
La famille Harel au grand complet
"Nous produisons 400 000 poissons d’ aquarium chaque année, essentiellement des scalaires et des poissons anges. La totalité part vers des pays européens: France, Allemagne, Belgique, Grèce, Portugal, Espagne et Suède".
Selon Monique Harel, "Beaucoup de clients européens vont préférer les poissons israéliens aux poissons asiatiques, car ils se trouvent en meilleure santé. Nous élevons tous nos poissons sans antibiotiques et dans une eau naturelle. Ils sont toujours transportés par avion et les trajets vers l’Europe ne sont pas longs."
La science au service de l'aquaculture
Dans les années 1980, une trouvaille scientifique israélienne a débouché sur cette activité peu ordinaire dans un endroit ou l’eau se trouve si rare. Malgré cela, ces terres arides ne sont pas stériles. Les nappes phréatiques du désert du Néguev et de l’Arava regorgent d’eau saumâtre imbuvable, mais particulièrement indiquée pour la pisciculture.
Cette eau géothermique, puisée à plusieurs centaines de mètres sous la terre, sans polluant et d’une température idéale de près de 37 °C en moyenne, s'avère idéale pour l’élevage de poissons d’eau chaude.
Par ailleurs, Israël a développé une méthode d'élevage qui engendre des rendements impressionnants dans tout le Néguev et la régions d'Arava en adoptant des systèmes couverts oxygénés, de «bulle» ou de «tente», augmentant la production de plus de 400%, avec une production atteignant jusqu'à 20 kg de poissons par m3 d'eau.
Complémentarité entre pisciculture et agriculture du désert
Pour Monique Harel, " la véritable innovation se trouve dans la complémentarité entre pisciculture et agriculture du désert. Les déchets naturels produits par les poissons d’élevage rendent l’eau particulièrement riche, ce qui en fait un engrais idéal pour les cultures."
"Les agriculteurs piscicoles israéliens recyclent l’ensemble de l’eau dans laquelle les poissons ont été élevés pour irriguer leurs champs.
Elevage de poissons d'aquarium Moshav Hatzeva
Dans notre exploitation, nous réutilisons sept à dix mètres cubes d’eau par jour pour l’arrosage des champs de dattes, situés tout près des poissons."
Pourtant, la pisciculture du désert se trouve en danger. "Avec la baisse de l’Euro, cette activité tournée essentiellement vers l’Europe devient de moins en moins rentable. Pendant ces deux dernières années, presque la moitié des fermes du désert ont cessé d'élever des poissons."
Mais Monique Harel ne perd pas espoir, et conclut en disant qu’elle n’hésitera pas à développer encore un nouveau secteur innovateur, afin de sauver son "paradis du désert".
Par Hélène Lesman
Source EconoStrum