vendredi 16 octobre 2015

Yael Naim à Brest : " Envie de se lâcher..."

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Sept ans après «New Soul», la chanson qui l’a révélée au monde entier, Yael Naim revient un album encensé par la critique, « Older »....Interview...



Votre dernier album s’appelle Older (plus vieux). Une façon de prévenir que vous n’êtes plus la petite chanteuse de vos débuts ?C’est le titre d’une chanson de l’album, qui parle d’une personne qui est en train de quitter cette vie, et de quelqu’un qui l’accompagne. Pendant l’enregistrement de cet album, j’ai perdu quelqu’un dont j’étais très proche et je suis devenu maman pour la première fois. L’idée qu’un jour on apparaît et un autre on disparaît m’a beaucoup accompagnée à ce moment-là. Donc au moment de choisir un nom pour l’album, ce mot-là est apparu comme celui qui racontait tout.


Comment avez-vous pensé cet album avant d’entrer en studio ?Quand on prépare un album, il y a toujours des envies, mais ce n’est jamais une route tracée à l’avance. Comme dans la vie, il y a des surprises, des changements de route… On avait surtout des envies de lâcher quelque chose, la voix, une énergie, de moins se cacher…


Votre voix épate, justement, dans cet album. Pourquoi nous surprend-elle aujourd’hui ?C’est quelque chose que je lâchais en concert, mais pas quand j’étais dans ma cabine en train d’enregistrer toute seule. Je n’arrivais pas à me lâcher, alors que l’énergie exposait sur scène. Il y a quelque chose qui s’est débloqué. Peut-être est-ce le fait de devenir maman, ça a lâché une forme de contrôle que j’avais avant.


Pourquoi vous être entourée du trio vocal 3SomeSisters pour ce projet ?Depuis New Soul on avait l’envie d’exprimer une écriture chorale classique. Mais d’habitude, c’est moi qui enregistrais toutes les voix, car on avait jamais trouvé une chorale qui pouvait faire les trucs classiques et les trucs plus soul. Quand on a croisés les 3SomeSisters, on s’est dit que c’était enfin le trio qui avait cette souplesse-là. On est très content de les embarquer sur scène avec nous, en tournée.


Vous jouez quoi sur cette tournée ?On joue beaucoup Older, car je voulais jouer l’intégralité de l’album, et des incontournables des anciens. Et aussi une surprise…

Votre public a-t-il évolué depuis la révélation New Soul ?Oui. On sent qu’il est moins sur l’attente d’un tube. A l’époque de New soul, il y avait un décalage. Aujourd’hui on a une connexion plus continue avec les gens. Et ça crée une autre énergie sur scène. C’est peut-être aussi parce qu’on aborde aussi des sujets plus profonds ou graves. Mais le fait de se dire qu’on est mortel donne aussi envie de profiter pleinement : c’est comme la saudade, il y a une gravité et une force de vivre.


On redoute à nouveau une troisième intifada au Proche-Orient. Comment vous, qui avez grandi en Israël, vivez ces événements ?Avec un peu de désespoir parfois. C’est une histoire sans fin, d’une injustice infinie. Ç’aurait été tellement bien d’avoir un peu plus de sagesse, et de comprendre que chacun a envie de vivre dignement. Je n’arrive pas à m’identifier seulement de mon côté. La réponse n’est pas là-dedans: il faut essayer de comprendre l’autre côté. Car se mettre à la place de l’autre, c’est le début du dialogue.


La musique a-t-elle un rôle à jouer dans ce dialogue ?Enfant, en Israël, j’ai découvert qu’il y avait d’autres cultures que les Israéliens et les Juifs. Ça m’a donné envie de voyager. Du fait d’aimer d’autres couleurs, d’autres musiques, avant de même rencontrer les gens, j’étais déjà ouverte au monde, grâce à la musique. Même sans passer de message en particulier, la musique peut aider à s’ouvrir aux autres.


Vous jouez de la musique depuis vos neuf ans. Qu’est-ce que vous découvrez encore, aujourd’hui ?C’est sans fin. On a envie de découvrir de nouvelles couleurs, comme la musique électronique. De faire de la musique pour d’autres formats : la danse, les films, sortir de la chanson. Il a une musique qui me rend dingue depuis des années : celle du Bollywood des années 50 à fin 60, avec des orchestres énormes, et des compositeurs qui venaient de la musique classique ou arabe. L’écriture est incroyable ! Il y a quelques années, on est partis en Inde pour commencer un projet avec un compositeur de cette époque, mais on n’a pas eu le temps de le finir. Alors je rêve de finir ce projet-là.


Et chanter en Français ?J’écris mes textes. Quand j’étais petit j’écoutais la musique anglophone et israélienne, et aujourd’hui, j’écris dans ces langues. Mais en Français, ça ne vient pas aussi facilement. J’espère que ça viendra : j’adore Gainsbourg, Camille, des gens qui écrivent et chantent en Français. J’espère que je pourrai le faire aussi.


Source Le Telegramme