mercredi 3 février 2016

Margny-lès-Compiègne : soixante ans après, le survivant de la Shoah raconte




Leon Malmed parle d’une voix calme, presque rassurante. Dehors, ce mardi, le ciel est gris, la pluie claque sur les fenêtres du collège Claude-Debussy de Margny-lès-Compiègne. Dans la salle, l’ambiance est lourde. Les élèves de ces deux classes de 3e écoutent ce « survivant de la Shoah » dans un silence de cathédrale...



« Son histoire est tragique », dira Mathias à la fin de son intervention. Son histoire, c’est celle d’un enfant juif de 5 ans qui, le 19 juillet 1942, échappe, avec sa grande sœur Rachel, aux griffes de la police et de la Gestapo venues arrêter sa famille, à Compiègne.
« À cinq heures du matin, deux policiers français frappent à la porte et ordonnent à nos parents de les accompagner au commissariat de police », raconte Léon. Les deux enfants ne doivent leur salut qu’à leurs voisins, la famille Ribouleau, qui se propose de les garder « jusqu’au retour des parents ». De retour, il n’y aura point. Srul et Chana Malmed, 32 et 28 ans, seront exterminés à Auschwitz.
Léon et Rachel ont vécu trois ans chez les Ribouleau. Aujourd’hui encore, Léon les appelle « Papa Henri » et « Mamie Suzanne ».
« Ce sont mes héros. Tant que je vivrai, je n’oublierai jamais cette famille qui a risqué sa vie pour sauver la nôtre. » Ses héros ont été décorés de la médaille des Justes parmi les nations. Un arbre à leur nom a été planté au musée Yad-Vashem, à Jérusalem.
Cette histoire, Léon Malmed l’a passée sous silence pendant soixante ans : « J’avais mis en bouteille ce passé douloureux avec l’intention de ne jamais y toucher ». Mais le temps passe.
Et six décennies plus tard, celui qui a fini par réaliser une brillante carrière aux États-Unis, dans la Silicon Valley, se décide à raconter son témoignage dans un livre*.
Depuis, Léon enchaîne les conférences. « Après tant d’années de silence, je témoigne avec l’espoir que mes enfants, mes petits-enfants, mes amis ou les lecteurs empêcheront de répéter les erreurs du passé. »


* « Nous avons survécu. Enfin je parle », édité par le Mémorial de l’internement et de la déportation de Compiègne, 225 pages, 22 €


Source Le Parisien